Aide juridictionnelle : Taubira fait un pas en arrière, les avocats maintiennent leur mouvement

22 octobre 2015 à 5h35 par La rédaction

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Christiane Taubira, ce mercredi. © AFP
© AFP Christiane Taubira, ce mercredi.
Au c-ur de la discorde: l'article 15 du projet de loi de finances 2016, dont le premier volet a été adopté jeudi dernier par les députés. Pour financer la réforme de l'AJ, dispositif permettant aux plus démunis d'avoir un avocat, cet article prévoit de ponctionner les produits financiers des fonds de clientèle qui transitent par des caisses gérées par les avocats, les Carpa. Un prélèvement de 15 millions d'euros sur les intérêts des Carpa était prévu sur deux ans, 5 millions pour 2016 et 10 millions pour 2017. "Il n'est pas question que nous payions un impôt pour travailler", déclarait mercredi matin le président du Conseil national des barreaux (CNB), Pascal Eydoux.

Reçus à la mi-journée à la Chancellerie, le président du CNB et les représentants de la Conférence des bâtonniers et de l'Ordre des avocats de Paris semblent avoir obtenu gain de cause. "Ce que nous avons acté au terme de près d'une heure trente de réunion, c'est (...) que nous puissions, au stade de la discussion avec le Sénat, présenter un amendement gouvernemental qui supprime cette disposition", a déclaré Christiane Taubira devant la presse. Le Sénat doit examiner à la mi-novembre le texte voté le 15 octobre par les députés.

"En contrepartie, la profession s'engage à contribuer" à financer les nouvelles technologies qui seront mises en place "dans le cadre de la réforme de la justice civile", a-t-elle précisé.

Les avocats maintiennent la pression
 

"En enlevant cette disposition, nous supprimons 5 millions d'euros au budget de l'aide juridictionnelle prévu pour 2016. Par conséquent, ce budget qui était de 405 millions d'euros, sera de 400 millions", a expliqué Christiane Taubira. "La ministre doit désormais nous adresser des propositions concrètes", en expliquant quand et de quelle manière elle déposera cet amendement au Sénat, a réagi Pascal Eydoux. "Nous appelons donc à maintenir le mouvement", a poursuivi le président du CNB, au moins jusqu'à une assemblée générale prévue vendredi à 17H00.

Le Syndicat des avocats de France (SAF) ne se satisfait pas non plus des mesures annoncées par Christiane Taubira et déplore toujours une baisse des revenus des avocats. La ministre "n'a toujours pas pris position sur la baisse de la rétribution prévue par la réforme du barème", a déploré Florian Borg, président du syndicat, qui appelle également à poursuivre le mouvement.

La réforme de l'AJ prévoit notamment un relèvement du plafond de revenus pour les bénéficiaires, une refonte du barème de rémunération des actes et une participation des barreaux au financement. Christiane Taubira a répété mercredi que le système de l'aide juridictionnelle était "à bout de souffle" et que cette réforme était donc nécessaire. Elle a souligné "l'augmentation constante" du budget de l'AJ, passé "de 275 millions d'euros il y a quinze ans à 375 millions cette année".

Lors de sa rencontre avec les avocats, la garde des Sceaux a également fait savoir qu'elle s'était "émue" des affrontements entre des avocats et des CRS au palais de justice de Lille, mardi, et qu'elle allait diligenter une enquête sur ce sujet. La ministre cristallise en ce moment les colères de plusieurs professions. Après les policiers la semaine dernière, et les avocats, ce sont les personnels de l'administration pénitentiaire qui manifesteront jeudi, à Paris.